Ma chère Ysolt,
Devine qui t’écris encore aujourd’hui ? C’est ta Keiri ! Comme j’ai pas mal de temps libre, vu que j’ai rien à faire, j’en profite.
L’Etendue de Rhalgr est plutôt sympa comme endroit. Il y a plein de ruines de partout et tout autant de coins à explorer, mais cette chute d’eau va me rendre folle. Elle fait un boucan d’enfer. Et elle s’arrête jamais de couler. Plus j’écoute ce son et moins mon cerveau semble fonctionner. En fait, les moines qui venaient ici avant ne méditaient pas, ils étaient devenus complètement abrutis à force d’entendre ce bruit en boucle. Le pire, c’est que comme l’endroit est encaissé, ben, ça résonne de partout. Où que tu te trouves dans le camp, tu entends cette satanée chute d’eau. T’as l’impression d’avoir des cascades dans tous les recoins. Même en te bouchant les oreilles, t’as toujours l’impression d’entendre l’eau tomber, et ça, jour et nuit ! Et comme je peux pas sortir du camp… j’te laisse imaginer ! J’ai la tête comme une pastèque !
En plus, j’ai rien à faire et je m’ennuis grave. Avant, j’pouvais tuer le temps en cherchant à bouffer. Mais maintenant, j’ai même plus ça. Il suffit de demander à monsieur Marcelin. Monsieur Keiji m’emmène bien de temps à autres à l’extérieur, mais j’ai l’impression d’être l’animal de compagnie qu’on promène pour éviter qu’il ne déprime. Enfin, ça pourrait être pire… pourrait y avoir une chute d’eau dehors aussi !!
Y a quelques jours, y a eu un orage. Il a pas plu, mais y avait du tonnerre et des éclairs. J’suis pas sortie de ma tente.
Madame Sélène est occupée avec les mages aux drôles de chapeaux pointus. La plupart sont borgnes d’ailleurs, faudra m’expliquer en quoi n’avoir qu’un œil aide pour faire de la magie. Madame Sélène a bien deux yeux pourtant. Mais p’être que c’est un œil de verre en fait, j’sais pas. Y a trois jours, elle nous a invité dans sa tente, avec monsieur Keiji. Elle avait l’air fatiguée. J’ai découvert qu’elle fumait. Bon, j’avais déjà senti l’odeur sur elle, mais je pensais que ça venait de quelque chose autre. Elle a voulu que j’essaie, ben, j’ai pas aimé. Elle dit que ça détend, mais si les gens semblent détendus, c’est parce qu’ils sont morts d’asphysquecie de manque d’air. Elle veut pas que j’en parle dans le camp, parce que des gens pourraient avoir envie de venir voler ses réserves pour faire du trafic. Prolonger sa vie en se faisant voler ce truc serait pas forcément une mauvaise chose. Enfin bref.
Avant-hier, pendant que je trainais les pieds dans le camp, je suis tombée sur un petit groupe de soldats plus sympa que les autres. Pour une fois, eux ne m’ont pas dit d’aller voir ailleurs si j’y étais. J’pense qu’ils ont dû avoir pitié de me voir tourner en rond tous les jours. Ils s’entrainaient avec des épées en bois et des bâtons. Je les ai regardés un petit moment et un d’eux m’a demandé si je voulais essayer. J’ai dit que j’y connaissais rien du tout, mais ils m’ont proposé de me montrer comment faire. Après tout, madame Sélène m’a offert un couteau, mais je m’en suis jamais servi que pour couper mes sandwichs. Ils m’ont donné une épée en bois, j’me suis mise en tenue et m’ont montré des trucs. A la fin, moi j’étais claquée et j’avais mal aux bras. Mais ça m’a bien occupée et les soldats avaient l’air contents aussi. J’étais toute transpirante, alors après, j’suis allée me rincer dans la rivière. (Faut bien que cette foutue chute d’eau sert à quelque chose.). Ils m’ont invité à venir faire des exercices avec eux un autre jour, ça peut toujours faire passer le temps. Pis, à force de manger, j’vais m’empâter, surtout si j’fais rien à côté. J’veux pas ressembler aux grosses dames qu’on croisait dans la rue avant.
Sinon, à part ça, ça va bien. Là, je t’écris depuis ma tente, suis allongée sur mon matelas. J’ai un peu chaud mais c’est calme. Pis, comme c’est comme ma maison, j’peux m’balader en soutif dedans au pire si fait vraiment trop chaud. Enfin, en même temps, c’est pas le Thanalan non plus.
J’ai bientôt plus de papier alors je vais te laisser là pour aujourd’hui. J’espère que tout va bien aussi pour toi. Je t’écrirais de nouveau bientôt.
Bisous, je t’aime.
Keiri
_________________
|